Devons-nous nous réjouir de la réforme du CICE ?

par le conseil d'administration de Coopaname

Le conseil d'administration de Coopaname en 2018
Une coopérative comme la nôtre est tout sauf une bulle hors du monde. Imaginée comme un outil de défense des droits des travailleur·es autonomes, la manière dont nous nous organisons est profondément liée au contexte général. 

Or, depuis l’élection d’Emmanuel Macron, nous assistons à l’accélération de la transformation du modèle social français vers plus de libéralisme. Ces réformes passent notamment par la baisse et la suppression des cotisations patronales et salariales, et touchent au cœur notre coopérative.


Nous, administratrices et administrateurs de Coopaname, trouvons nécessaire de formuler une prise de position sur ces enjeux, notamment dans le cadre du débat autour du changement de modèle de contribution des membres à notre scop. Ces changements nous impactent sur deux fronts : l’un politique, l’autre technique.

Du point de vue de notre projet politique, d’abord.
Les cotisations, salariales comme patronales, c’est bien du salaire. Les réduire, les supprimer, les transformer en CSG, c’est concrètement baisser nos salaires.

Coopaname est née, dans le sillage du mouvement des coopératives d’activités et d’emploi, pour défendre le principe de la protection sociale. Le salariat, s’il peut être critiqué sur d’autres plans et notamment du point de vue de l’organisation du travail subordonnée qu’il a suscitée, constitue l’une des plus efficaces expériences de mutualisation des risques jamais mise en œuvre.

Les cotisations sociales sont au cœur de ces mutualisations. Nous y sommes profondément attaché·es et nous n’aurons de cesse de les défendre pour que la protection sociale soit toujours plus complète : c’est sur ce modèle que doivent s’harmoniser les autres statuts des travailleur·es, et pas l’inverse.

Quand bien même les réformes promues par le gouvernement ont un impact positif sur nos salaires nets, nous ne pouvons pas nous réjouir : leur impact à terme sur notre protection sociale est très négatif.

D’un point de vue technique maintenant.
Depuis 2013, nous avons fait le choix d’affecter le CICE* au budget de l’entité mutualisée**. Au 1er janvier 2019, ce crédit d’impôt se transforme en baisses de cotisations patronales.

D’un côté, c’est une ressource de l’entité mutualisée qui est transférée vers les activités. C’est ce qui explique une partie des débats en cours autour des modalités d’augmentation de la contribution des activités vers la coopérative, pour lui permettre de continuer à fonctionner.

De l’autre, la baisse des cotisations patronales permet d’atténuer l’effet de cette augmentation qui n’aura qu’un impact modéré sur les salaires nets.

Ce qui se passe en réalité, c’est que nous passons d’une mutualisation de l’ensemble des salarié·es, d’une solidarité interprofessionnelle nationale, à une forme de mutualisation interne, à l’échelle de Coopaname. Ça reste une défaite. Mais ce n’est pas une raison pour baisser les bras ! À nous de faire en sorte que Coopaname, avec l’ensemble du mouvement coopératif, constitue l’espace dans lequel on expérimente et on invente les solidarités de demain.

* CICE : crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
Cette aide aux entreprises avait été mise en place en 2013, pour permettre aux entreprises de créer de l’emploi. Ca ne s’est pas vérifié dans les faits. Lisez, à ce sujet, l’article «Le maigre bilan du CICE» sur le site d’Alternatives économiques.

** L’entité mutualisée de Coopaname regroupe les fonctions mutualisées de la coopérative : les locaux, l’équipe, les projets spécifiques (jeunesse, informatique) ainsi que la vie collective des instances (conseil d’administration, commissions, comités, etc.).